Neuf personnes sur dix ont une carence en Oméga-3 dans leur alimentation. Ce chiffre issu d’un rapport de l’ANSES de 2015 est alarmant. Pourtant ces acides gras sont considérés comme « essentiels ». Et leurs vertus pour la santé sont indéniables. Quelles sont les causes et les impacts de ces carences alimentaires ? Qu’est ce que le rapport Omega 3 – Omega 6 et comment influence t-il notre santé ? Les réponses dans cet article.
Présentation
Les omégas-3 sont une famille d’acides gras biologiquement actifs. Ils sont essentiels au fonctionnement, à la signalisation et à la réponse optimale de nos cellules. Leur implication est importante au sein des systèmes nerveux et cardio-vasculaires. De ce fait, les omégas-3 ont de nombreux bienfaits dans la prévention et le soutien de l’organisme.
On qualifie ces acides gras d’essentiels car l'organisme ne peut pas les synthétiser, alors qu'ils sont pourtant indispensables à son fonctionnement. Ils doivent donc obligatoirement être apportés par l’alimentation ou les compléments alimentaires.
Le nom “oméga-3” provient de la structure moléculaire de ces acides gras polyinsaturés. En effet, la première double liaison se trouve sur le 3e carbone à partir du carbone oméga ⍵.
D’après l’EFSA, les omégas-3 sont indispensables à un grand nombre de processus biologiques tels que :
- le fonctionnement du cœur et le maintien de la pression sanguine
- le fonctionnement du cerveau et du système nerveux
- le maintien de la vision
- le maintien des lipides sanguins (triglycérides et cholestérol)
De plus, de nombreuses études épidémiologiques montrent qu’un apport suffisant en oméga-3 végétaux permet de maintenir un vieillissement en bonne santé et de soutenir de nombreuses fonctions de l’organisme. 1.
Les 3 principaux Omega 3
Les trois principaux oméga-3 sont l’acide alpha linolénique (ALA), l’acide eicosapentaénoïque (EPA) et l’acide docosahexaénoïque (DHA).
L’ALA se trouve dans les végétaux, en particulier les graines oléagineuses (riches en huile). C’est pour cette raison que l’on trouve dans les huiles végétales, telles que le lin, le chanvre ou les noix par exemple.
Le DHA et l’EPA sont naturellement présents dans les poissons gras. Cependant, il est aussi produit par certaines microalgues marines.
L’ALA est considéré comme un précurseur, car il permet la synthèse de l’EPA puis du DHA. Néanmoins, le taux de conversion de l’acide alpha linolénique en EPA est faible, de l’ordre de 1 à 4%. En effet, l’ALA est principalement utilisé lors de la b-oxydation (principale voie de dégradation des acides gras) pour produire de l'énergie cellulaire (ATP).
De plus, le taux de conversion diminue avec l’âge. La supplémentation ou un rééquilibrage alimentaire s’avère nécessaire pour assurer les apports journaliers en ALA, mais ils ne sont pas toujours suffisants pour répondre aux besoins en DHA et EPA.
Les besoins
Les besoins journaliers en Oméga-3 ont été définis par les différentes autorités sanitaires (ANSES et OMS).
Pour l’ALA (acide alpha-linolénique, Oméga 3 végétal), la dose à prendre est de 2 grammes par jour. A titre d’exemple, prendre quotidiennement deux cuillères à soupe d’huile de colza ou 6 noix permet de combler les besoins. Plus de détails dans notre article sur les aliments riches en oméga 3.
Pour le DHA et l’EPA, les autorités recommandent 250 mg par jour au minimum pour un adulte en bonne santé, dont 100 à 200 mg de DHA. A titre d’exemple, prendre 200 grammes de sardines par semaine permet de combler ces apports. Pour les végétariens, il faudra prendre par exemple 1 cuillère à soupe d’huile de lin tous les jours pour obtenir sa dose de DHA/EPA à partir de la conversion d’ALA.
A noter que pour les femmes enceintes et allaitantes, les besoins en DHA sont augmentés, de 100 à 200 mg/jour.
Carences en Oméga-3 dans l’alimentation
En 2015, l’ANSES publie un rapport sur les apports en acide gras en France, consultable en accès libre [3]. Ce rapport met en avant des insuffisances ou des carences en oméga-3 touchant plus de 85% de la population adulte française. En détail, les apports insuffisants touchent 99% des adultes pour l’ALA, 85% pour le DHA et 89% pour l’EPA. Ces carences touchent également les enfants de 3 à 9 ans ainsi que les adolescents de 10 à 17 ans. Le tableau ci-dessous présente les résultats de cette étude.
Cette étude conclut que, même si l’apport quotidien moyen en lipides totaux est satisfaisant, celui en oméga-3 est largement insuffisant. Elle recommande d’améliorer le profil de consommation des acides gras en France. Il convient de privilégier des aliments riches en oméga-3, ou des compléments alimentaires, tout en limitant la consommation d’aliments riches en acides gras saturés.
Impact des carences nutritionnelles
D’après l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), les principales conséquences liées à une déficience en oméga-3 sont :
- des perturbations émotionnelles
- un fonctionnement non optimal du système cardiovasculaire
- la tendance à stocker les graisses
- une vision perturbée
- un vieillissement cognitif
Le ratio Omega-3 / Omega-6
L’importance de ce ratio
Les autorités de santé recommandent un ratio inférieur à 5 entre les apports en oméga-6 et oméga-3. Il faut apporter 1 molécule d’oméga-3 pour maximum 5 molécules d’oméga-6. Idéalement, il faudrait viser un rapport ≤ 4 : 1.
Les omégas-3 et les omégas-6 possèdent des structures moléculaires similaires. Ils partagent un grand nombre de voies métaboliques et sont donc en compétition pour être utilisés par l’organisme. La problématique est qu’en cas d’assimilation trop importante d’oméga-6, ou insuffisante d’oméga-3, les omégas-3 ne sont pas correctement utilisés et ne remplissent pas entièrement leur fonction biologique. Un déséquilibre des apports peut notamment concourir au développement d’inflammations chroniques et de dérèglements physiologiques associés. En effet, les omégas-6 sont les précurseurs de molécules inflammatoires. Si les molécules d’oméga-6 sont présentes en trop grande quantité, elles seront préférentiellement utilisées par les enzymes, favorisant l’inflammation et l'agrégation plaquettaire dans la circulation sanguine. A l’inverse, les Oméga-3 contrent les effets des Oméga-6.
Trop d'Oméga 6 ?
Il existe une idée répandue qui consiste à dire que l’alimentation moderne est trop riche en Oméga-6. Cela s’explique par la consommation de produits transformés utilisant des huiles riches en Oméga-6 : maïs, tournesol, soja par exemple. C’est valable pour les fritures, les plats préparés… Mais aussi, les animaux nourris au soja ou au maïs ont bien plus d'Oméga 6 que ceux nourris à l’herbe 2.
Et pourtant, le rapport de l’ANSES de 2015 3 révèle que 63% de la population française a aussi une carence en Oméga 6 dans l’alimentation…
D’autre part, les Oméga 6 sont bons pour la santé. On les retrouve dans l’huile de bourrache, de nigelle, de courge, d’onagre… Des huiles reconnues pour leurs effets sur la physiologie de la peau, du cholestérol, des articulations, des hormones… Tous les détails sont dans notre article : Omega 3,6,9 et 7.
Alors que penser ?
Le déséquilibre du ratio Omega 3/Omega 6 est principalement dû à l’importante carence en Oméga 3 dans notre alimentation. Apporter de l’ALA, EPA et DHA en quantité suffisante permet d’améliorer mécaniquement ce ratio, sans limiter des Oméga 6 déjà déficient dans l’alimentation.
D’autre part, tous les oméga-6 ne se valent pas. Le problème ne vient pas de leur nature, mais de leur forme. Lorsqu’ils sont chauffés, raffinés et oxydés (comme c’est le cas dans les produits industriels), ils peuvent devenir nocifs en favorisant des dérivés pro-inflammatoires.
Et en effet, ceux qui consomment beaucoup de plats préparés ont une tendance à un excès d'Oméga 6. Mais pour ceux qui cuisinent et qui ont une alimentation équilibrée, la diminution de l’apport d'Oméga 6 ne fait pas forcément sens : ce sont les carences nutritionnelles en Oméga-3 qu’il faut combler. La consommation de poissons gras et les graines très riches en ALA (perilla, chia, lin et caméline) est une manière idéale pour équilibrer rapidement le ratio.
Combler les carences avec les compléments alimentaires
Il existe plusieurs options pour apporter ces précieux acides gras en supplémentation. La première consiste à prendre une huile de poisson. La meilleure forme est l’huile de krill : elle a un ratio EPA/DHA idéal et ces derniers sont sous forme de phospholipides très assimilables.
La seconde option est l’huile de lin est la reine des huiles végétales. Elle est riche en ALA avec un excellent rapport Omega 3/Omega 6.
La troisième option consiste à prendre de l’EPA et du DHA végétaux, obtenus à partir d’une microalgue: Schizochytrium sp.
Conclusion
Les carences en oméga-3 sont aujourd’hui un enjeu majeur de santé publique: plus de 85 % de la population française est concernée. Essentiels au bon fonctionnement du cardio-vasculaire, du cerveau ou des yeux, ils sont trop peu consommés dans notre alimentation moderne. Ce déséquilibre est aggravé par un ratio oméga-6 / oméga-3 trop élevé. Mais contrairement à certaines idées reçues, le véritable problème ne réside pas dans les oméga-6 eux-mêmes, mais plutôt dans le manque d’oméga-3. Pour rétablir l’équilibre, il est donc essentiel d’augmenter les apports en ALA, EPA et DHA, via une alimentation riche en poissons gras et en huiles végétales de qualité.
Résumé
La carence en oméga-3 touche plus de 85 % de la population française, impactant de nombreux systèmes biologiques essentiels comme le cœur, le cerveau ou la vision. Cet article décrypte les causes de cette insuffisance, ses conséquences et les moyens efficaces d’y remédier, notamment en optimisant le ratio oméga-3/oméga-6.
Sources
1 - Harris, William S., et al. Nature communications 12.1 (2021): 1-9.
2 - A review of fatty acid profiles and antioxidant content in grass-fed and grain-fed beef, 2010
3 - Rapport de l’ANSES, Apports en acides gras de la population vivant en France et comparaison aux apports nutritionnels conseillés définis en 2010, Septembre 2015.